La Lettre de l'AGSAS n°
75
Mars 2023
ÉDITORIAL
Sortir de la grisaille et du froid hivernal avec l’arrivée du printemps, osciller entre averses bienvenues et soleil qui réchauffe la terre et les cœurs, tel est le mois de mars au cœur de l’année scolaire où les projets en cours se poursuivent et ceux de l’année à venir se construisent.
À l’AGSAS, le travail de fond se poursuit : formations, séminaires, préparation de la prochaine revue, en particulier.
Les séminaires, rassemblant une quarantaine de personnes, permettent aux participants de se ressourcer, de trouver l’énergie pour continuer à aider les jeunes et leurs familles à donner du sens à l’école malgré le contexte social et politique, chamboulé et chaotique, qui perdure.
La préparation des journées en octobre qui auront pour objectif d’approfondir les réflexions sur le Soutien au Soutien, la participation prévue aux colloques et congrès à venir des partenaires de l’AGSAS, dans toute la France et à l’étranger, tout cela montre combien le travail de co-réflexion est à l’œuvre et permet de tisser des liens humains qui constituent le souci premier et la force de l’AGSAS.
S’ajoutent à tout cela, en un jaillissement printanier, les propositions de partage, de découverte, de livres, films, poèmes qui nourrissent la pensée pour que le chemin à suivre se présente plus serein pour tous, en ces temps de grands bouleversements.
« L’éducation est l’arme la plus puissante que l’on puisse utiliser pour changer le monde », affirmait Nelson Mandela.
Alors, de nos places d’adultes accompagnants, puisons dans cette lettre l’énergie et l’espoir pour continuer à guider les enfants, les familles vers un monde où chacun est reconnu comme un interlocuteur valable, où la pensée et la parole de chacun, chacune sont respectées, pour que les générations présentes et à venir soient « l’avenir de l’humanité ».
VIE DE L' AGSAS
Formations ARCH
Dans La Lettre de mars 2022, nous annoncions :
Du nouveau pour les formations ARCH à Paris en 2022-2023 !
Aujourd’hui, nous pouvons vous dire que ces nouveautés ont été bien reçues.
La formation à l’animation de l'ensemble des ARCH, sur deux jours en novembre puis un jour en mars, a recueilli plus d’inscriptions que nous ne pouvions en accepter. Nous avons donc pris le risque de proposer une deuxième session de formation, en février et mai, qui a été annoncée en janvier seulement et se plaçait pour certaines académies au milieu des vacances d'hiver. Elle a néanmoins finalement recueilli 16 inscriptions.
C’est ainsi plus de 40 personnes qui se forment cette année à l’animation des ARCH sur Paris.
La journée d’échanges sur les Ateliers de Philosophie AGSAS®, pensée en direction de toute personne déjà formée depuis plus ou moins longtemps, était une première ! 11 personnes y ont participé, dont certaines formées et animant ces ateliers depuis longtemps. Les échanges ont été très riches et vous pouvez en avoir un écho à travers les brefs témoignages vidéo recueillis à l’issue de la journée.
Un grand merci à l’OCCE qui accueille dans ses locaux la formation de février-mai.
L'école des 4 langages, film documentaire
Projeté déjà deux fois suite au colloque AGSAS 2022, le film sur l'école Jacques Lévine de Chabannières continue son chemin.
Josse Annino assistait à ces projections, voici son témoignage.
Comme l’a écrit Paul Psaltopoulos au lendemain de la projection du documentaire sur « l’école des 4 langages » à St Didier sous Riverie, village accueillant l’école Jacques Lévine, « ce fut une fois encore une pleine réussite : près de 70 personnes présentes, beaucoup d’émotions exprimées, beaucoup de remerciements. Un moment de rencontre fédérateur entre une équipe et plusieurs générations de parents. Que du bonheur, selon l’expression consacrée ! »
J’ajouterai que ce fut aussi une occasion pour tous les participants, qu’ils soient parents d’élève, enseignants ou citoyens curieux, de poursuivre le dialogue sur les finalités de l’école, le rôle de chacun dans son développement et le sens des dispositifs proposés dans cette école singulière.
J’ai été particulièrement touchée par les propos de ce papa, familier de l’école depuis plusieurs années mais n’ayant comme référence que sa propre expérience d’une pédagogie traditionnelle, transmissive et autoritaire. Il a inscrit ses enfants à l’école du village sans bien comprendre l’intérêt de certaines pratiques. Jusqu’alors il faisait simplement confiance à l’équipe mais le film, disait-il, avait changé son regard et lui avait permis, entre autres, de mesurer toute l’importance du « Quoi de neuf ? ». La comparaison avec les retrouvailles autour de la machine à café lui avait parlé. Depuis, Corinne Famelart, enseignante dans la classe de sa fille, a constaté que ce papa a changé de position lorsqu’il entre de la classe. Il est plus présent, plus attentif.
Quelques jours auparavant, nous avons vécu une autre expérience auprès des 80 spectateurs venus découvrir le film « l’école des 4 langages » au cinéma Paradisio à St Martin en haut (69). Peu de parents d’élèves étaient présents. Mais si le public était plus distancié, il a réservé un bel accueil au documentaire, et le débat qui a suivi, sur la singularité de cette école et son devenir, a duré plus d’une heure !
Chacune de ces projections a débouché sur l’expression d’une incompréhension du public : mais pourquoi cette école des 4 langages n’est-elle pas plus développée ? Pourquoi n’y a-t-il pas plus d’enseignant.e.s formé.e.s aux méthodes de l’AGSAS ? Que faudrait-il faire pour promouvoir son développement ?
Le film est déjà une partie de la réponse, reste à le diffuser le plus largement possible !
Si vous souhaitez organiser une projection dans votre région, vous pouvez vous adresser à Véronique Boquin-Sarton ou Rose Join-Lambert qui vous accompagneront dans votre projet.
Les journées d'octobre 2023
Cette année, l'AGSAS a décidé de remplacer le colloque par des journées de réflexion autour du Soutien au Soutien, pilier du travail de l'association.
Elles auront lieu à Paris le samedi 7 et dimanche 8 octobre 2023.
Les informations seront bientôt en ligne sur le site et dans la prochaine Lettre.
Colloque à Montréal
La proposition de communication de l'Agsas a été retenue pour le colloque "Pour une école philosophique. La philosophie avec les enfants, un paradigme pour une école démocratique et humaniste" qui aura lieu du 10 au 12 mai à Montréal.
ACTIONS AVEC LES PARTENAIRES
Le collectif RASED reçu au ministère
Le 18 janvier 2023, le collectif RASED a été reçu par Thomas Leroux, Conseiller aux Affaires pédagogiques et aux savoirs fondamentaux dans le cabinet du ministre de l'Éducation nationale. Maryse Métra y représentait l'AGSAS.
Vous pouvez lire le compte rendu de l'audience sur le site de l'AGSAS.
Forum CEP-Enfance 2023
Le CEP-Enfance organise un nouveau forum le 3 juin 2023 (de 9h à 16h30) à la Bourse du travail à Paris :
Comment porter une politique favorable à l'enfance ?
Vous pouvez découvrir le programme de la journée et vous inscrire, ici.
Congrès AGEEM
Du 5 au 7 juillet 2023, à Roanne, aura lieu le congrès AGEEM.
Ce sera l'occasion pour les participants de réfléchir à
Comment Accueillir - Dire - Agir ensemble à l'école maternelle ?
Le guide pédagogique est téléchargeable à partir de ce lien.
Plus d'infos sur le site du congrès, ici.
L'AGSAS sera également présente avec une table de presse.
À DÉCOUVRIR
Mais qui était donc Henri Wallon ?
Trois auteurs, fins connaisseurs de l'œuvre d’Henri Wallon, publient un ensemble de textes de ce dernier.
Ils écrivent dans la 4è de couverture du livre :
"L'oeuvre d’Henri Wallon, trop méconnue malgré le renom de son auteur, demeure d’un intérêt et d’une fécondité majeurs pour la psychologie et pour l’ensemble des sciences humaines et sociales. Définissant le psychisme et son développement comme se produisant à l’articulation et dans la contradiction entre le biologique et le social, cette œuvre est un exemple très riche de dialogue exigeant entre la psychologie et les autres disciplines (philosophie, biologie, sociologie...), et déploie une pensée qui va à l’encontre de tous les réductionnismes aujourd’hui dominants. »
Dans un article pour le Café pédagogique, Jean-Yves Rochex, l’un des auteurs, donne un aperçu de la richesse et la complexité de cette pensée et de l’homme, dans lequel Jacques Lévine voyait un de ses maîtres.
Bonne lecture !
Rose Join-Lambert
Quand M. Lucien perd sa mère...
Clinique du soutien au Soutien auprès des professionnels du handicap
C'est avec grand plaisir que l'AGSAS vous annonce la publication du livre écrit par Martine Lacour, membre de l'association.
Pour se le procurer, c'est ici !
De fil en aiguille
de Françoise Wauters, (TheBookEdition.com, 2022)
Dans ce livre, nous suivons sur quatre générations, la vie d'une famille qui va traverser les bouleversements de l'histoire et rencontrer des changements économiques et techniques incroyables. Après la guerre de 1914-18, ils vont quitter les terres agricoles pour gagner les cités urbaines, et travailler dans les usines des grandes villes, restreindre leur liberté d'être au grand air, et vivre pour leurs enfants, avec cette conviction que l'école de la République va leur donner une éducation pour les aider à mieux vivre.
Cette histoire familiale qui croise la grande Histoire, de 1872 à 1967, est déclinée par l'auteure dans 4 cahiers : au fil du temps, au fil des saisons, au fil des ans, et au fil des jours.
Françoise Wauters destinait ce livre a ses seuls petits-enfants, car elle souhaitait qu'ils connaissent leurs racines et le mode de vie de ceux qui les avaient précédés. Mais en cheminant dans l'écriture, et de fil en aiguille, comme l'exprime la métaphore du titre de son livre, elle a décidé de partager avec le plus grand nombre cette histoire singulière dans laquelle beaucoup de familles peuvent se retrouver,
Nous l'en remercions et avons éprouvé beaucoup de plaisir à lire ce livre où l'on peut mesurer l'importance des rencontres, celles qui vous élèvent, et d'autres qui vous laissent des cicatrices indélébiles, et où l’on retrouve les valeurs qui sont les siennes : féminisme, écologie et humanisme.
Maryse Métra
Sundborn ou les jours de lumière
Philippe Delerm, Édition Folio.
C’est une écriture qui chemine entre ombre et lumière, entre 1919 en Suède et 1884 à Grez-sur-Loing, une écriture qui va et vient entre souvenirs d’un passé enchanté et considérations empreintes d’amertume d’artistes scandinaves qui ont regagné leur pays.
Dès 1860 et surtout dans les années 1880, nombre d’artistes installés à Paris ont fui les ateliers de la capitale et formé une colonie cosmopolite au sud de Fontainebleau, à Grez-sur-Loing exactement. Américains, Anglais, Japonais, Scandinaves, tous voulaient capter la lumière si particulière de la région, lumière due à la présence de l’eau et de la forêt toute proche.
Philippe Delerm a choisi de développer l’intrigue, à la fois historique et romanesque, autour d’un jeune Français de 18 ans, Ulrik Tercier qui n’a aucun talent pour la peinture et qui cherche sa voie. Il est d’autant plus désemparé que sa mère, Danoise, vient de mourir. Il a l’avantage d’avoir été le témoin privilégié de l’effervescence artistique qui a eu lieu à Grez, témoin de la quête du bonheur de vivre et de peindre des protagonistes, Soren Kroyer, Karin et Carl Larsson, essentiellement. À côté d’eux et désigné comme l’ami de Carl Larsson, résident l’écrivain August Strindberg, son épouse et leurs deux fillettes ; August Strindberg rédige un livre sur les paysans français. Ulrik s’acquitte d’autant mieux de sa mission qu’il est du pays et reconnu comme un ami discret et fidèle par chacun des artistes. Aussi devine-t-il les souffrances muettes et les blessures « qui ne sont que l’envers du bonheur et qu’il faut dire aussi. »
Sa relation, toute de délicatesse à Julia, amie de Karin Larsson aux Beaux-Arts de Stockholm, et qui vient les rejoindre à Grez-sur-Loing, enrichit l’intrigue car Julia s’interroge sur le renoncement de Karin à peindre depuis qu’elle est devenue mère, alors que son mari jouit de toute liberté.
En août 1884, Ulrich se rend avec Julia à Skagen en Suède, où ils découvrent de magnifiques paysages venteux avec une lumière bleue particulière. Julia qui croit qu’on « ne peut servir à la fois l’art et le bonheur » aimerait rencontrer Claude Monet et c’est ainsi que le jeune couple se rend à Giverny. Julia est très heureuse auprès du grand peintre, et comme Ulrik se sent de trop, il accepte l’invitation des Larsson de les rejoindre à Sundborn en août 1888. Ils ont subi jalousies et méchancetés, - notamment de la part de Strindberg - tandis que Julia écrit en 1895 une lettre d’adieu à Ulrik : « je ne peux plus créer et la création des autres demeure une souffrance intolérable. »
Ulrik dont le père s’est suicidé, se résoud à vendre sa maison de Grez-sur-Loing ; il achète alors un appartement à Paris et ouvre une galerie d’art où il expose des peintres comme Edouard Vuillard, Pierre Bonnard et Suzanne Vallotton.
J’ai aimé ce roman sur l’amitié, sur les aléas de la vie, sur la consolation que donne l’art quand déferle la barbarie - à l’époque c’était la première guerre mondiale – mais aussi sur la nostalgie des jours heureux et la lumière qui demeure « au bout des pages blanches et du silence ».
Jeanne Moll
Le bébé et ses savoirs
De Erika Parlato Oliveira, éditions Érès Collection Mille et un bébé n° 182, octobre 2022
L’auteure est à la fois psychanalyste clinicienne et chercheuse cognitiviste dans un Babylab.
Bonne nouvelle du côté des bébés, et même plus tard !
Souvent le développement des bébés nous est présenté comme ce que le bébé peut ou pourrait faire à tel âge s’il a un bon entourage, autrement dit s’il est bien stimulé. Dans son livre, Erika Parlato nous fait changer de paradigme. En tant que psychanalyste clinicienne observant les bébés et les parents, elle rend compte des échanges entre le bébé et l’adulte l’entourant, ce qui inclut l’intentionnalité du bébé dès sa naissance et même avant. En tant que chercheuse cognitiviste travaillant en laboratoire, E. Parlato met ses hypothèses de clinicienne en question. Par exemple, elle prouve que le jeu de mimiques entre un bébé et un adulte est à l’initiative tantôt de l’adulte et tantôt de l’enfant. Le bébé nous provoque et continue à nous provoquer en fonction de notre réponse.
Grâce à la double appartenance de l’auteure, un des grands intérêts de ce livre est de présenter clairement les dernières conclusions des recherches scientifiques concernant le développement des bébés, et de les mettre en relation avec leur vie réelle au milieu d’humains dans le monde tel qu’il se présente à eux.
Oui, c’est une bonne nouvelle que le bébé soit reconnu comme sujet ! Même si ce n’est pas une nouveauté, en particulier pour l’AGSAS !
Mais ce sera peut-être une découverte, ou une confirmation, que les bébés disposent d’un savoir interprétatif dès leur naissance. Dès le départ, le bébé est sujet, il observe, compare, fait des liens, mémorise, réinvestit, il constitue son être à partir de tout ce qui se présente à lui, en même temps qu’il construit une image du monde. Il est un statisticien qui travaille à partir de ses sens, de sa perception et de sa mémoire, sans avoir les théories des adultes. Chaque bébé perçoit le monde en lui donnant des qualités, des valeurs, un sens, attributs qui révèlent la façon dont chacun, de manière singulière, s’approprie les objets et l’autre dans la relation.
« Chaque bébé a sa lecture du monde », formulait J. Lévine. Le bébé naît avec des capacités qui perdurent s’il s’en sert par exemple pour son confort, ses relations, ou bien qui disparaissent s’il ne s’en sert pas. Par exemple, il a des compétences à apprendre n’importe quelle langue à la naissance, compétences qui se réduiront rapidement à celle utilisée par ses proches.
Erika Parlato nous confirme scientifiquement que, dès la naissance, l’enfant est un interlocuteur valable comme l’exprimait J. Lévine. Elle le fait avec son engagement de psychanalyste et sa rigueur de scientifique consciente des limites de validité de son savoir : « Ce que nous pouvons observer est l’apparence de l’action, son résultat, et non le processus qui a amené à l’exécution de l’action, processus qui répond de toute la singularité de chaque sujet, de chaque bébé […] Nous sommes convaincue que ce que nous ignorons encore dépasse le savoir que nous en avons. »
Si ce livre contribue à ce que davantage d’adultes observent les bébés et leur répondent, il aura fait faire un grand pas à l’humanité, et apporté un grand soulagement aux bébés !
Christian Deligne
Printemps des poètes
Du 11 au 27 mars 2023, le Printemps des Poètes nous invite à entrer en poésie.
Maryse Métra partage ce que cela lui inspire, ici.
Les semailles
Un film sur la Pédagogie institutionnelle
Nous relayons avec grand plaisir ce message des réalisatrices d’un film sur la Pédagogie institutionnelle.
En espérant que nous serons nombreux, nombreuses à le visionner.
Le film documentaire Les Semailles, tourné dès juin 2016, veut :
- témoigner de l’expérience singulière qu'a été la mise en œuvre de la Pédagogie institutionnelle à l'école de Javrezac en Charente,
- contribuer à la formation et à la transformation des pratiques professionnelles enseignantes.
Une fin qui marque un début
La fermeture de l'école en 2016 a été le point de départ de la conception de ce film, et comme il s'agit de transmission, de pédagogie, de transformation, de cycles, nous avons fait nôtres les mots de Raymond Bénévent, visiteur de l'école :
"Les récoltes sont toujours très longues après les semailles."
Avec ce film, nous espérons aider à penser qu'il est possible d'enseigner autrement, qu'il est possible de s'engager dans cette Pédagogie institutionnelle, qui souvent impressionne au premier abord.
Anouk Ribas & Charlotte Aristide, réalisatrices
Pour le voir
https://vimeo.com/ondemand/lessemailles
Voir la bande annonce et louer ou acheter le film
Pour le soutenir
Toutes les informations pratiques sur la campagne de financement participatif (jusqu’au 23 mars)
https://fr.ulule.com/les-semailles/
ÉCHOS DU TERRAIN
Cette rubrique est destinée à accueillir vos témoignages du terrain.
NOS ÉCRITS
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